AVERTISSEMENT 
 
Le thème du curé racontant un rêve imaginaire pour effrayer et ramener à la pratique religieuse ses 
paroissiens quelque peu mécréants a inspiré bon nombre d'auteurs. 
Chacun a plus ou moins en mémoire le conte du curé de Cucugnan mais l'attribue le plus souvent à 
Alphonse DAUDET qui n'a pourtant rien fait d'autre que de traduire le texte écrit par ROUMANILLE 
en prose provençale. 
Lou curat de Cucugnan de Joseph Roumanille est une oeuvre parfaite. 
Mais Achille Mir, en réinventant les personnages surpasse tous les autres auteurs en donnant à son 
récit un truculent mélange de poésie et de drôlerie. 
C'est ce chef-d'oeuvre que nous voudrions faire redécouvrir. 
Edité en 1884 à Carcassonne par l'imprimeur-éditeur L. BONNAFOUS et fils, au Tome III des 
oeuvres complètes d'Achille MIR, le conte LOU SERMOU DAL CURAT DE CUCUGNA a été 
réédité à Montpellier l'année suivante avec un texte légèrement remanié et suivi d'une traduction en 
langue française. 
Malheureusement si la traduction est d'abord fidèle, au fil des pages elle s'écarte de plus en plus du 
texte languedocien. 
C'est pourquoi, en regard du texte initial, dans sa pureté originale de 1884, nous avons choisi de placer 
une nouvelle traduction que nous avons voulu littérale, presque mot à mot. Cela pour deux raisons: 
— Pour permettre au lecteur de suivre le texte occitan qui n'est plus compréhensible que pour une 
minorité d'habitants de ce pays. 
— Et surtout pour mieux faire apprécier le pittoresque du texte languedocien. 
Cette traduction ne prétend évidemment à aucune valeur littéraire. Son seul objet est de mieux faire 
apprécier l'oeuvre d'Achille MIR. 
ACHILLE MIR 
Son père voulait qu'il soit cultivateur, comme lui. 
Sa mère avait plus d'ambitions, elles rêvait d'une profession libérale. 
La mère eut raison: son fils, né le 30 novembre 1822 à ESCALES, village chargé d'histoire dans la 
vallée de l'Aude, entre Carcassonne et Narbonne, entra à l'Ecole Normale de Carcassonne et fut 
instituteur de 1842 à 1847 à Aigues-Vives puis à Capendu. 
En 1848, à 25 ans, nommé directeur de l'Ecole Annexe de l'Ecole Normale de Carcassonne il 
franchissait le seuil d'une brillante carrière. 
Or, surprise, en 1854 il donna sa démission à la fois de Directeur et de membre de l'Enseignement 
public. Il quittait volontairement ce qui était une voie royale pour un fils de paysan, il abandonnait à la 
fois la sécurité de la fonction et l'assurance d'une promotion sociale. 
Les motifs d'une décision si surprenante sont inconnus. 
Sans doute notre professeur était-il un poète, ce qui n'arrive pas seulement aux mathématiciens et aux 
experts-comptables. 
Il ne renia pas, cependant, sa vocation d'enseignant puisque, jusqu'en 1869, la plupart des maisons 
d'éducation de Carcassonne l'eurent comme maître de calligraphie et que, plus tard, il consacra une 
partie de son activité à la formation des apprentis. 
Mais Achille se voua à la poésie, d'abord en français, puis en languedocien à la suite d'un voyage à 
Toulouse où il eut la révélation de l'importance de la naissance du Félibrige, l'Ecole Littéraire fondée en 
Provence pour redonner ses lettres de noblesse à la langue romane. 
C'est en 1850, en effet, que le poète provençal ROUMANILLE publiait ses premières oeuvres. En 
1852 se tenaient à Arles et à Aix le congrès des TROUBAIRES. Le 21 mai 1854 Mistral et ses amis 
fondaient le Félibrige à l'assemblée de Font-ségugne. 
En 1862, Achille MIR présenta à un ami son poème: La Bigno (La Vigne) hommage tout à la fois à 
son pays et à ses origines vigneronnes. Puis la Damo Jano. 
La Bigno, primée à la Société Archéologique de Béziers fut publiée en 1863. 
Puis parurent Les Muses du Midi, recueil mensuel de poésies, françaises et languedociennes. 
Octobre 1869 marqua un tournant surprenant dans sa vie: Les actionnaires de la Manufacture de draps 
de la Trivalle, à Carcassonne, le nommèrent directeur de leur société. A la fois poète et industriel, il 
trouva quand même le temps de se consacrer à de multiples activités de charité, de formation des 
apprentis et de secours aux blessés de la guerre de 1870. 
Sans que cela l'empêche de se charger aussi de l'organisation de fêtes et de cérémonies. Là aussi il fit 
merveille car son don de délier le rire lui faisait aussi délier les bourses. 
C'est à l'occasion d'un concours organisé par la Société des Arts et Sciences de Carcassonne, en 1884, 
qu'il écrivit ce chef-d'oeuvre: Lou Sermount dal curat de Cucugna. 
Il obtint le prix d'une rose d'argent. 
Il ne devait plus ensuite se présenter à aucun concours, préférant laisser la place à de plus jeunes 
félibres. On retrouve dans ce choix la marque de sa première vocation d'enseignant. Son talent étant 
consacré, il voulait faire naître de nouveaux talents. 
Il consacra toute sa vie à l'épanouissement de l'homme et de la langue de son pays et se donna les 
moyens d'en avoir la liberté. Ce fut à la fois un humaniste et un homme libre. 
En 188G, Achille MIR participa à la fondation de la Revue de l'Aude par Achille Rouquet. Cette revue 
prit en 1889 le titre de Revue Méridionale. En 1892, à la demande de MISTRAL, il fonda à 
Carcassonne un collège de félibres: L'Escolo Audenco. 
A son dernier triomphe en 1897, à l'occasion des fêtes organisées par les Cadets de Gascogne, il reçut 
les palmes académiques mais le suprême honneur de cette journée fut son couronnement de feuilles 
vertes, comme un empereur romain, par le sculpteur Falguières. 
Il mourut en 1901. Le 10 août, la ville de Carcassonne fit au félibre de splendides funérailles. Le 
provençal M. PATIN exprima dans ce raccourci tout le talent d'Achille MIR: 
— Ce qui frappe dans son oeuvre, ce qui séduit, c'est le choix de l'expression. Elle est hardie et 
pittoresque. 
Et il ajoute: 
— C'est ainsi qu'il ne dit pas banalement pleurer, ou verser des larmes mais: 
Pèrlejoun dins moun cor 
(elles perlent dans mon coeur) 
ou, pour dire qu'un village domine la plaine: 
ès quilhat sus rocs 
(il est perché sur les rochers) 
L'image chez Achille MIR émane d'une sensation personnelle, elle exprime des impressions qu'il a 
ressenties lui-même et s'il déclenchait l'hilarité c'est parce qu'il se moquait avec humour des petits et 
grands travers de chacun. Voleurs, chapardeurs et menteurs de toutes sortes étaient sa cible. De l'avare 
il dit qu'il tond les oeufs ou, pour tel autre: s'il vend un oeuf, je crains qu'il en ait retiré le jaune. 
Allez donc savoir pourquoi il n'aime pas les meuniers! Ils semblent avoir tous les défauts réunis 
puisque dans le Sermon du Curé de Cucugnan, il dit qu'une journée entière ne sera pas de trop pour le 
blanchir. Mais il n'était pas le seul à montrer une telle antipathie envers cette corporation. On la 
retrouve chez tous les auteurs qui ont écrit et réécrit des versions de ce sermon, depuis Blanchot de 
Brénas. Il faut savoir que le passage au moulin était inévitable pour le paysan. Il y portait son grain et 
en retirait la farine pour nourrir sa famille et le son pour engraisser son bétail. Or, la charge semblait 
toujours plus légère au retour qu'à l'aller. On soupçonnait le meunier d'être un voleur. De plus, il était 
toujours plus ou moins usurier. 
Méchamment à un autre meunier qui cheminait avec son âne, Achille MIR fait dire par un plaisant: 
— Où allez-vous tous les deux? 
Le meunier pourrait répondre: 
— Querre de bren per toutes tres. 
(chercher du son pour tous les trois) 
Dans le décor de la campagne languedocienne et des villes voisines il peint les caractères du petit 
monde qu'il a connu il y a un peu plus d'un siècle. 
Les femmes sont querelleuses ou revêches lorsqu'il leur manque l'attrait d'être légères. 
Les hommes ne sont pas écharpés en tant que tels, solidarité oblige, mais certaines professions ou 
situations fournissent ses personnages préférés: Les médecins, les gens de justice, les gens d'église: 
bedeaux, sacristains, chantres, et surtout le curé. 
Il a aussi aimé chanter sa patrie, la France, célébrée en quelques beaux vers, par exemple dans Caritat et 
Benjenco lorsqu'un inspecteur prussien demande à un enfant quelles sont les nations principales, 
Achille MIR lui fait répondre: 
— Las nacius principalos soun la Franço! 
Comme il avait raison! 
LE SERMON DU CURÉ 
Un Conte Traditionnel de Langue d'Oc 
Le thème du Sermon du Curé était déjà ancien lorsqu'il fut repris par Achille MIRGaston 
JOURDANE écrivait en 1900: (1) Le premier thème de ce conte est essentiellement populaire. On le 
trouve dans un dialogue dont quelques vers ont survécu: 
1) Selon cet écrit anonyme et semble-t-il disparu, le héros de l'aventure est le père BOURRAS, dont le 
nom rime avec Ginestas et marque un indiscutable cachet d'origine (audoise). 
... Donc le père Bourras a un rêve. Il se présente à la porte du Paradis: 
- Pan, pan, qui tusto debas? 
- Lou paire Bourras. 
- Qual demandas? (2) 
- De gens de Ginestas. 
- Aici n'i a pas. 
- Anats pus bas. (2) 
Au purgatoire, même réponse. Désolé le père Bourras se présente à la porte de l'Enfer et pose la même 
question. 
On lui répond: 
- Dintrats, dintrats, 
- N'i en manco pas. 
2) Sur cette donnée Hercule BIRAT a composé un petit poème français Le Sermon du Père Bourras 
qu'il a fait figurer dans le VIe entretien de ses Poésies Narbonnaises (3). Ce recueil parut en 1860 mais 
son impression (son écriture) a commencé au moins quinze ans auparavant et nous avons toutes 
raisons de croire que le VIe entretien a été composé vers 1855 ou 1860, ce qui devrait couper court aux 
revendications d'antériorité formulées plus tard par Blanchot de Brenas. 
Birat a travaillé sur le thème original de Ginestas et en a gardé toutes les indications de nom et 
d'origine. C'est ce qu'en dit Gaston Jourdane. Il aurait pu ajouter que Birat a insisté lourdement sur les 
évocations de son terroir, cherchant à flatter les riches familles et les chefs-lieux, tout en laissant 
transparaître l'intérêt que le bas clergé portait aux biens matériels. Ainsi, lorsqu'après un insipide et 
flatteur préambule, le père Bourras répond à Saint-Pierre qui lui propose de choisir une meilleure 
paroisse: 
- Un chef-lieu d'arrondissement, 
C'est trop pour moi, quant à présent 
Mais tenez, par exemple, Azille, 
Où fleurit la riche famille 
Des Jouy, qui chaque an s'accroît, 
M'irait comme une bague au doigt. 
Dans mon canton j'aurais Jouarre, 
Où j'irais souvent toucher barre, 
Et qui me vaudrait cent écus, 
Bon an, mal an, peut être plus. 
- Ne seriez-vous pas bien à Bage? 
- Oh, Saint-Pierre, quel badinage! 
J'aimerais autant Armissan, 
Treilhes, Roquefort ou Tuchan... 
Bien sûr, ce qu'écrivait Birat n'a aucune valeur littéraire. Reconnaissons lui le mérite d'être le maillon 
qui a permis d'enchaîner et d'amener de meilleures interprétations. 
3) BLANCHOT DE BRENAS (4) publia en 1858-59, sous le titre Avec mon ami Félix, une série de 
onze articles sous forme de lettres dans la revue La France Littéraire Artistique et Scientifique, éditée à 
Lyon. 
Il y raconte un voyage dans l'Aude. Parmi divers souvenirs de voyage et relation de légendes et de 
contes il rapporte ceci, écrit depuis Vignevieille (5). 
Le clergé des Corbières offre à l'observation des types fort peu communs... Ecoutez cette homélie que 
je répète telle qu'elle me fut contée. La scène se passe dans un hameau... Nous appellerons ce village 
Cucugnan. 
Et l'auteur ajoute en note: Cucugnan est près du village de Rouffiac-des-Corbières; l'anecdote 
rapportée dans cette lettre n'a pas eu lieu à Cucugnan; ce nom a été pris au hasard pour ne froisser 
aucune susceptibilité. 
Et Blanchot de Brenas rapporte ensuite le fameux sermon de l'abbé Martin. Son récit est très court, il 
ne remplit que trois colonnes de la revue. On y trouve cependant les principaux éléments qui seront 
ensuite développés par les autres conteurs: 
L'abbé Martin monte au Paradis. Saint-Pierre ouvrant son grand livre balbutie: Cu... cu... Cucugnan! Il 
donne de bonnes sandales à l'abbé pour monter plus haut: le Purgatoire, puis l'Enfer. Là parmi les 
flammes il distingue le père Gaulinier qui se grisait et battait sa femme, la petite Mioune qui se 
couchait facilement, la Françoise qui s'est mariée trois fois, Bascou l'esprit fort du village, et l'usurier, et 
le voleur... 
L'histoire se termine par la grande lessive de la confession générale. 
Ecrite avec esprit, la narration de Blanchot de Brenas n'est cependant pas une oeuvre littéraire mais il 
faut lui reconnaître, outre une certaine antériorité, le mérite d'avoir recueilli ce conte populaire et de 
l'avoir transmis. 
4) Le grand ROUMANILLE reprit ensuite ce thème sous le titre Lou Curat de Cucugnan (6). 
Joseph Roumanille naquit à Saint-Rémy de Provence le 18 août 1818, aîné de sept enfants, de Jean- 
Denis Roumanille, jardinier, et de Pierrette Piquet. Il fit ses premiers essais poétiques en 1836 dans un 
journal de Tarascon. 
ROUMANILLE 
C'est devant la tristesse de sa mère, incapable de comprendre ses vers, car elle ne connaissait que le 
provençal, qu'il choisit d'écrire désormais dans sa langue maternelle. 
Il fut en 1845, professeur dans une institution d'Avignon où fut élève Frédéric MISTRAL. 
Roumanille était d'une douzaine d'années l'aîné de Mistral qui ne terminait ses études qu'en 1847 mais 
leurs parents, nés de localités voisines, se connaissaient. Tout présageait de ce qui fut une longue 
amitié. 
LOU CURAT DE CUCUGNAN que Roumanille écrivit en prose est une authentique oeuvre littéraire, 
malheureusement trop méconnue car on en connaît surtout la traduction faite par Alphonse Daudet. 
5) DAUDET était un ami de Roumanille et des autres félibres provençaux qui étaient fiers d'avoir pour 
ami cet écrivain parisien. 
Alphonse Daudet publia Le Curé de Cucugnan en 1866 dans le journal L'événement puis en 1869 
dans Les Lettres de mon moulin. 
Le texte de Daudet n'est qu'une traduction servile et abrégée de celui de Roumanille. Mais cela n'a pas 
outragé les félibres provençaux, pas plus que Roumanille lui-même: ils étaient tous fiers qu'on parle 
d'eux à Paris. 
Daudet avait d'ailleurs déjà écrit à Roumanille que la traduction de son Sermon du Curé de Cucugnan 
fera bien à Paris (7). 
Il est connu en Provence que cette traduction ne fut pas le seul emprunt fait par Daudet dans le Midi et 
qu'il fut un grand pilleur des écrivains provençaux et que son pillage frisa l'impudeur puisque le thème 
de l'Arlésienne fut emprunté à un drame qui a endeuillé la famille de Frédéric Mistral. 
Ce pillage est tellement évident dans le Sermon que l'accusation d'imposture faite à Daudet au sujet de 
sa collaboration avec Paul ARENE mérite d'être reprise. 
Si Paul Arène reconnaît dans le Gil Blas du 16 décembre 1883 que sur les 23 nouvelles conservées 
dans l'édition définitive des Lettres de mon Moulin la moitié à peu près fut écrite par nous deux et si 
sur la dizaine restante un certain nombre a été pillée en Provence que reste-t-il d'authentique dans 
l'oeuvre de Daudet? 
6) Achille MIR publia en 1884 à Carcassonne ce chef d'oeuvre en vers languedociens que nous 
présentons ici: Lou Sermou dal Curat de Cucugna. 
7) Frédéric ESTRE en 1888 fit paraître une autre version de ce conte dans le journal Le Troun de l'Er à 
Marseille. 
8) En 1892, A. FOURES publia une traduction du Sermon du Père Bourras en vers languedociens 
dans Lo Grill de Toulouse. 
9) En 1970, André LAGARDE fit une traduction en langue d'Oc des Lettres de mon Moulin 
d'Alphonse Daudet. Ce fût un retour aux sources. 
10) En 1977, dans le livre Cucugnan, village que j'aime de Marcel Baillat, Norbert MOUNIE fit une 
traduction en vers français du poème d'Achille MIR. 
Personne ne peut donc revendiquer la paternité du thème du Sermon du Curé de Cucugnan. 
Le sujet trouve ses racines dans le tréfonds folklorique des Corbières. L'anonyme rapporté par Gaston 
JOURDANE le situe à Ginestas, peut-être parce que le nom de ce lieu rime avec le père Bourras. 
Blanchot de Brenas le situe à Cucugnan, un hameau assez petit pour ne froisser aucune susceptibilité. 
Il reconnaît lui-même qu'il a ramassé ce conte dans le folklore des Corbières et avoue ainsi que n'était 
pas fondé le procès qu'il intenta pour essayer de s'approprier la paternité de ce conte. 
Le père Bourras, ou le curé Marty, étaient-ils à Ginestas, à Cucugnan ou dans une autre paroisse? Nul 
ne le sait. Ce qui est certain, c'est qu'ils avaient charge d'âmes dans l'un des villages des Corbières. 
Peut-être même étaient-ils plusieurs dans diverses paroisses à tenter de ramener à Dieu leurs brebis 
égarées en utilisant le même stratagème du Sermon terrifiant. 
(1) Gaston Jourdane. Contribution au folklore de l'Aude. 1900, p. 123. 
(2) Il semble que G. Jourdane ait fait une petite faute de transcription car il aurait dû écrire: demandats 
(vouvoiement) et non pas: demandas (tutoiement) puisque trois vers plus loin il écrit: Anats. Il fait 
même dire: Dintrats, au gardien de l'Enfer qu'on ne croirait pourtant pas capable d'une telle déférence. 
(3) Hercule Birat. Poésies Narbonnaises - Narbonne - Caillard 1860 - Tome II, p 483. 
(4) Blanchot de Brenas (1838-1877), juge à Yssingeaux, puis à Cusset (Allier). Nous adressons nos 
plus chaleureux remerciements à Madame Bertrandy, bibliothécaire à Lyon qui a très aimablement fait 
la recherche de ce texte et nous en a procuré une copie. 
(5) U. Gibert. II y a plus d'un siècle à travers les Corbières, avec Blanchot de Brenas. Revue Folklore – 
1978, p.170-171-174. 
(6) Armana Prouvençau - 1867 - mais écrit avant cette date (U. Gibert). 
(7) Collection privée M. Louis SIAUD - Libraire à Avignon (Librairie Roumanille). 
LA TRADUCTION DU CONTE D'ACHILLE MIR 
Sermon du Curé de Cucugnan d'Achille MIR a déjà publié en édition bilingue en 1885. 
La confrontation des deux textes: languedocien et français, fait rapidement apparaître que la traduction 
française n'est pas très fidèle à l'oeuvre originale. 
Cela pourrait s'excuser si l'auteur, dans sa traduction, avait recherché un rythme et une musicalité dans 
l'écriture, ou une versification même si elle était assez libre. Or, ce n'est pas le cas. 
La liberté prise par le traducteur n'apporte rien mais, malheureusement, elle dénature souvent l'oeuvre de 
l'auteur. 
PRONONCIATION DE LA LANGUE D'OC 
RÉGLE GÉNÉRALE. En languedocien, toutes les lettres se prononcent distinctement, et l'on écrit 
comme on prononce. 
Ainsi, ai, ei en francais sonnent è comme dans maire ou reine. 
Mais en languedocien on prononce: a.i = a ï ou é.i = é ï (ex.: paire, reino) 
I - VOYELLES 
Voyelles simples: 
On écrit: a, e, é, è, i, o, u, ou. 
On prononce: a, é, é, è, i, o u, ou. 
Diphtongues: 
On écrit: ai, oi, au, ei, èi, eu, èu, où. 
On prononce: aï, oi, aou, éï, èï, éou, èou, oou en appuyant sur la première voyelle. 
Exemples: cassaire, almoino, caulet, trouneire, neil, beutat, beléu, pôu. 
On écrit: ia, ié, iè, io. 
On prononce: ia, ié, iè, io en appuyant sur la dernière voyelle. 
Exemples: bestial, pietat, amourié, borio. 
La diphtongue iu, se prononce iou en appuyant tantôt sur la dernière voyelle (ex. malgracius) tantôt, et 
le plus souvent, sur la première (ex. estiu, passiu). 
Triphtongues: 
Le dialecte languedocien est très riche en triphtongues et ces sons composés contribuent pour une 
large part à la beauté et au pittoresque de l'expression. 
On écrit: iau, ièi, eeu, iou. 
On prononce: iàgu, ièi, iéou, iôou. 
Exemples: siaudet, sieis, ieu, biou. 
II - CONSONNES 
C équivaut au français S devant une voyelle faible: e, i. 
(Ex.: francés, naciu). Il équivaut au français QU devant une voyelle forte: o, a, u. (Ex.: canta, cor, 
counescut). 
G devant e et i sonne j (ex.: gens, gibié). 
Devant a, o, u, il a le son dur (ex.: cangado, garrigo, agut). 
H ne s'aspire jamais en languedocien. Elle équivaut à l'H espagnole. 
L, N, R redoublés, doivent être prononcés très distinctement (ex.: palle, fennos, garrèls: prononcer: palle, 
fen-nos, gar-rèls). 
S entre deux voyelles a le son du Z français (ex.: dises - tu dis - se prononce: dizés). 
Les articulations g, j, ch, dans les sillabes finales se prononcent comme si elles étaient précédées d'un t 
court. 
On écrit: bilage, courajous, richard. 
On prononce: bilatge, couratjous, ritchard. 
L'équivalent du ll (double l) mouillé français est représenté en languedocien, comme en vieux roman, 
par lh: (ex.: filho = fille); de même que le francais gn est représenté par le nh (ex.: montanha = 
montagne). 
L'ACCENT TONIQUE 
En languedocien, l'accent est généralement sur l'avant dernière syllabe du mot. 
Parfois l'accent est sur la dernière syllabe du mot qui porte alors un accent, grave ou aïgu suivant que la 
syllabe est ouverte ou fermée (ex.: poudé, amourié). 
SERMOU DAL CURAT DE CUCUGNA 
POURTANELET D'INTRADO 
Aqueste Sermou rebirat 
Es un nisaliè de merbelho, 
Ount a d'abord poundut la muso de Birat; 
Apèi ben RoumanilLho, al cascal qu'ensourcelho, 
E Daudet de Paris, e lou Tron de Marselho. (1) 
Bous douni dounc pas res de nòu; 
Mès, cado aucèl, sabèts, a sa qualitat d'iòu. 
Bau serbi tout caudet lou qu'a 'spelit ma muso, 
Sans mai de tardo ni d'escuso. 
(1) Le Tron de l'Er était un journal de Marseille qui avait pris pour titre cette expression éminemment 
marseillaise. 
Ce journal publia en 1888 une version du sermon du Curé de Cucugnan écrite par Frédéric ESTRE. 
I 
Moussu l'abat Marti, curat de Cucugna, (2) 
Èro bou coumo lou boun pa, 
E tout lou mounde l'adourabo. 
Quand un paroussian recoultabo 
A l'ort, al camp, quicon de bou, 
Bite, bite un presen à moussu lou Ritou! 
Al temps das porcs, èro 'no manno; 
E sa madono, la Marianno, 
Qu'èro pas graciouso dous cops, 
En besent loumbets, salcissots, 
Arriba 'la parrabastado, 
Bascalabo coumo 'no fado. 
E paimens lou brabe curat, 
Tant cherit e tant ounourat 
De sa pichoto troupelado, 
Abiò soun amo entahinado. 
Cregats qu'èro pas sans rasou, 
Car lou dimenge, à soun sermou 
Pauquis de fidèls assistaboun, 
E lous pus exats i rouncaboun. 
(2) Marty est l'équivalent du patronyme français Martin. 
Pour la joliesse du texte nous prenons le parti d'appeler le curé, l'abbé Marty (Marti), même dans la 
version française. 
Lou paure abat, la larmo à l'èl, 
Disio souben à soun budèl, 
Ome brusc, qu'abiò fait la guerro: 
— Sario lou paradis sus terro, 
Cucugna, se moun escabot 
Èro 'n bricounet mai debot! 
Mès ba béses, brabe Batisto 
Sario pecat de fa la quisto, 
Car nous ben un bourril de gens 
Mal fargats, toutis endigents. 
Lou coufessiounal se cussouno: 
Iragnos, rats i fan tampouno, 
E las Pascos passoun de-lis 
Sans beire à ginouls un pelgris! 
O grand Dius d'amour e de graço! 
Se, dal naut dal cèl, sus ma jasso 
Daisses pas dabalha toun pietadous regard, 
Tout Cucugna 's flambat sans lard! 
Batisto brandissio la tèsto, 
Lous pungs sarrats: i'abiò 'n gros pauc 
Que teniò sa respounsa prèsto. 
Soulomen, d'un toun proubé rauc, 
Lou pauras bebiò coumo un trauc, 
S'afaguèt: — Zoup! la martingalo! (3) 
Amé la douçou, la mouralo, 
Besèts pla, Moussu lou Curat, 
Qu'abèts pas res, res abançat. 
Direts que preferats faire aima Nostre-Segne 
Que de trouna per lou fa cregne? 
Soui pas de bostre abis; predicats sus l'Enfer, 
Fasèts banaja Lucifer 
Armat de sa roujo fouissino, 
Qu'enfournélo tant de dannats, 
E beirets lous cors pus tanats, 
Qu'à la glèiso biroun l'esquino, 
Trambla de pòu, beni fidèls 
E magnaguets coumo d'agnèls. 
Lou curat, touto la semano, 
Sioguèt enquièt coumo'no bano. 
Crusèt, birounèt soun cerbèl; 
Nèit e jour menèt de desaire, 
Jusquos qu'ajèt troubat l'estèc ensourcelhaire 
Qu'i debiò fa'nclada l'escabot enfidèl. 
(3) Miser la martingale: jouer quitte ou double. 
II 
Gaiet coumo 'n Regina Coeli, (4) 
Lou dimenge d'après, se birant sul talou, 
Sans quita l'autà, lou ritou 
Legits, esplico l'Ebangèli. 
Mès, coupant court à soun sermou, 
Diguèt: — Coumo toujour, aici, mous caris fraires 
Bési, piètat! que siots pas gaires, 
E n'esprobi 'n grand mal de cor; 
Precisomen bouliò bous parla d'un tresor 
Que sabi pla certo ount se trobo; 
Dimenge, mous amics, bou'n dounarèi, la probo. 
Abertissèts tout Cucugna; 
Qu'à plenos mas bengue pousa, 
Car i'a d'argent e d'or abounde 
Per acountenta tout lou mounde. 
(4) Regina Coeli (Reine des Cieux), est l'un des chants consacrés à la Vierge. 
III 
La noubèlo ajèt pas besoun 
Ni de tambour, ni de claroun. 
A peno lou premiè picabo 
Que tout lou pople galaupabo, 
Coumo las fedos à la sal; 
S'espremission lous flancs en passant pel pourtal. 
Batisto, lou budèl, risiò que s'estoufabo, 
E lou cor dal ritou de bounur tressautabo; 
Tabés, lou moumen arribat, 
Sus chèro se quilhèt coumo 'n apasserat. 
— Mous fraires, s'afaguèt d'uno boues triounfanto, 
Es dit dins l'Escrituro Santo 
Que paures se demoufaran 
E que riches s'apauriran, 
Se riches soun sourds, se paures ausissoun. 
Lou tresor, lou tenèn; de l'èl e de la ma 
Pouirets beire e pouirets touca 
Lous bèlis louidors que lusissoun, 
Quand aurèi fenit de precha. 
Escoutats-me, siuplet, dins lou pus grand silenço. 
Tout d'abord, remercien la santo Proubidenço, 
Mous fraires, que bostre curat 
Siogue pas mort e enterrat. 
Ai! ai! la semano passado, 
Paurots! n'ajèri 'no fretado, 
Qu'es per un miracle de Dius 
Se poulsi, bèi, demest lous bius. 
Un catàrri, l'ase lou crèbe, 
M'abiò coupat l'alé; me creguèri reglat: 
Moun cos fret e sans pouls èro rette, estirat, 
Mès moun amo trepabo 'n rèbe. 
Jès! qui bous a pas dit que ieu, bostre pastou, 
Ieu, miserable pecadou, 
Per lous anges me sentiguèri 
Lebat, pourtat as quatre bents, 
E que, dins un pas res de temps, 
Lous èls alandats, me troubèri 
Dabant la porto d'or miralhanto dal cèl! 
L'intrado es touto pichouneto; 
Atendèri 'n boun quart d'oureto 
Abant de m'asarda de touca lou martèl. 
Anfin piqui: Pam, pam! lou cor batent de crento. 
Lou grand sant Pèire se presento 
E me fa sourisent: — Oï! acò 's bous, Marti! 
E qun boun bent bous meno aici? 
De que i'a per bostre serbici? 
De me bese tant pla aculhit 
Bous demandi s'èri rabit! 
D'i pensa, de bounur, tenèts, m'estabousissi. 
I respoundèri, radious: 
— Benio bous demanda, se soui pas trop curious, 
S'abèn à Cucugna quaucos amos salbados, 
E s' al Paradis soun dintrados. 
— Ei pas res à bous rafusa, 
Me dits lou Porto-claus, me prenguent per la ma; 
Dintrats e sesèts-bous; ensemble b' anan beire. 
E, se quilhant sul nas sas lunetos de beire, 
Pren un missal d'or, lou dourbits, 
Bagno lou cap dal det per bira ful, e dits, 
En palpejant, d'uno bouès rauco: 
— Bejan: Cu...cu...cugna, Cu...cugna, gar l'aici! 
Tè?... ne soui pla fachat per bous, brabe Marti, 
Mès la pajo es encaro blanco; 
Pas uno amo de Cucugna! 
— Pas uno amo, disèts? mès bous debèts troumpa 
Digus! digus! es pas de creire. 
Santo de Dius! tournats-bo-beire. 
— Digus, sant ome, regardats 
Bous-mèmes, se cresèts qu'aje d'èls empegats. 
— Ah! marrit sort! quno bergougno! 
Cridabi, tout mouquet, ame dous pans de trougno. 
Es fenit, soui desounourat! 
Pas un Cucugnanenc salbat!!... 
En me bejent desesperat 
E prèst à bira la boussolo, 
Lou Sant-Pourtaliè me counsolo 
En me diguent, la larmo à l'èl: 
— Se bostros gens soun pas al cèl, 
Brabe Marti, qu'i fa? bous ne siots pas l'encauso. 
Anats, deboun faire uno pauso 
A l'Espurgatòri, segur. 
— A l'Espurgatòri? malur! 
Per caritat, grand sant, que siots tant bounifaço, 
Fasèts-me lous bese, de graço, 
Per que lous posque counsoula! 
— Boulountiè, moun amic. Tenèts, anats carga 
Aqueste gros parel de sabatos ferrados, 
Car lou cami 's pas bèl, s'en manco rettomen: 
I'a mountados e dabalhados, 
De rebirets à tout moumen, 
E garo las amourricados! (5) 
En-la-lèng, troubarets un grand pourtal d'argent 
Claufit de crous es mascarados. 
Acò 's aqui, Marti. Filats, que se fa tard. 
Adissiats, tenèts bous galhard. 
(5) Amourricados (chutes), de amourrar: tomber face contre terre. Et de mourr: figure. 
IV 
E caminèri, caminèri! 
Quno batudo! Entrabuquèri 
Cent cops as calhaus, as carrals, 
As bartasses des carretals; 
Un fum de coulobros fiulaboun, 
A mous poumpils s'enfouassetaboun, 
En lous moussegant à bèl tal. 
Anfin à forço lou pourtal, 
Tout crousilhat de dol, à mous èls se presento; 
Truqui, boum!... Uno bouès rascagnudo e doulento: 
— Qui's acò 'n aquesto ouro? fa. 
— Ieu, lou curat de Cucugna. 
— De?... — De Cucugna. La sarralho, 
Rigo, rago! faguèt un sagan de ferralho. 
Un ange gigantal m'aparits: de la pòu 
Coumpti qu'auriò capiut refaudit dins un iòu. 
Jamai pus quno soumbro mino: 
Sas al os, dins l'escuresino, 
Esclairaboun coumo de foc. 
Restabi chut et mut, piquetat coumo 'n broc. 
— Dintrats, me fa 'n graugnant. 
Tout tremoulant dintrèri 
E l'ange carut seguiguèri. 
El countugnèt d'escribassa: 
Crac-crac, crac-crac, sans dire: amic, poudèts bous sèire. 
Soun libre èro dèts cops coumo lou de sant Pèire. 
— Finalomen, bejan, que benèts demanda? 
Me dits sec, en pousant d'ancro dins l'escritòri. 
— Bèl ange, boulgats m'escusa: 
Desirariò sabé se dins l'Espurgatòri 
Quauc 'ameto de Cucugna, 
Ome, fenno, goujat ou filho, 
Sariòn pas, per asard, bengudis se purga 
D'un bièl restant de peccadilho 
Soui l'endigne pastou... - Boun! boun! l'abat Marti? 
— Obé, moussu, per bous serbi. 
Alabets, gracious, lou menistre, 
La plumo sus l'aurelho, alandèt lou registre, 
E birèt, passèt fuls... Res. Tournèt fulheta... 
Am 'un soupir qu'anabo à l'amo, 
Me diguèt: — Besi pas digus de Cucugna! 
- Badinats pas, bessè! mèmes dins bostro flamo 
Me n' atroubats pas cap? Ount saran dounc anats 
Aquets trosses de desubrats? 
— E! sant ome, es juste de creire 
Que lous Cucugnanencs auran filat de-lis 
Toutis dins lou sant Paradis. 
Per boun' assegura, bous ba cal ana beire. 
— Ne beni! - Ne benèts! E be? — Ei bist sans lum 
Que n'i'abiò pas la cougo d'un. 
Alabets, se gratant l'aurelho, 
Coumo s'abiò sentit lou fissou d'uno abelho, 
L'ange ajoustèt: — Moussu Marti, 
Besèts qu'es pas besoun de saupre lou lati 
Per coumprene lou cas: l'èstre lou pus amòrri 
Dirà soun pas al cèl ni dins l'Espurgatòri? 
I'a nas de mièch, se fan rousti! 
— Ai! ai! ai! soui mort, Nostro-Damo! 
Me semblèt dins las cars senti 'no fredo lamo. 
— Es-ti poussible, Santo-Croux! 
O! moun bèl ange, qun atouts!... 
E patabi 'n cridant: — O! lous infourtunables! 
S'èstre anats fa crema lous rables! 
Mès que debendrèi ieu? Jamai Dius nou bouldrà 
Lou pastre sans troupèl per l'emparadisa! 
L'ange, de sa bouès pus doucillo, 
Pertoucat, me diguèt: — Cal pas fa tant de billo 
Ni mai pèrdre lou babarot 
Aban de saupre lou fin mot. 
E, me moustrant dal det un cami de trabèsso 
Tout bistournejant coumo 'n' èsso, 
Ajoustèt: — Anats, brabe abat, 
E prenèts gardo dal pabat. 
V 
Partiguèri, mous caris fraires, 
Coumo trespourtat per lous aires. 
Baste qu'ajèsse pas fregat 
De ma solo lou caladat, 
Tout grapauds, tout petards e tout tisous en flambo 
Que me beniòn à mièjo cambo; 
S'ajèri pas lous pèds cremats, 
Es gracio à mous souliès à dos aigos tachats. 
Arribèri 'n guelsant, rajent coumo 'n galafre, 
Descarat, pus negre qu'un Cafre. 
Un pourtalàs de fer sans tusta se dourbits: 
De que bejèri, mous amics! 
Un reboulum de foc e de car rabinado, 
Coumo fa 'n tros de pèl de merlusso grilhado, 
Ou la bato d'un biòu joul fèr rousent cachado, 
E de crids, de gingouloments 
Ame de glatisses de dents. 
(6) Tachats signifie: cloutés, aussi bien reliés, attachés par des clous que ferrés de clous comme c'est 
ici le cas. Jadis les clous de chaussures avaient parfois trois pointes pour améliorer leur ancrage dans 
la semelle: une pointe centrale et d'autres plus petites à l'extrémité de deux ailes. 
M'arruqui, gibrat d'espoubanto. 
— E be! que fas aqui, bièl panto? 
Dintres ou dintres pas? me dits 
Un grand diable banut, fumous, que me brandits, 
En me palpant coumo 'no figo. 
— Ieu? nani! dintri pas dins bostro orro boutigo, 
Raço de loups e de jousius: (7) 
Aprendrets que parlats à-n-un amic de Dius. 
- Que benes dounc bada, couiasso? - 
Ajoustèt en faguent uno afrouso grimaço. 
— Soui bengut, per curiousitat, 
Afinta soulomen s'auriòts pas embarrat 
Quauque Cucugnanenc. — I'as touto la cougado, 
E te la tenèn flambuscado. 
Tè, douno-z-i 'n cop d'èl; beiràs 
Se te mentissi, lèd courbàs. 
Un diable, coumprenèts, nous coumplimento pas. 
(7) Traduction littérale mais ici avec le sens de mécréant ou renégat. 
VI 
Ebejèri, dins lous brasasses, 
Bostres parents aimats alandant lous dous brasses, 
En me cridant: — Moussu Marti! 
O crèmo das ritous! coussi 
Abèn tant fait michant usatge 
De nostro bidasso al bilatge! 
O! s'abiòn seguit bostre abis, 
Tout dreit sariòn anats dins lou sant Paradis! 
E lous plours i degoutejaboun, 
E las flambos lous assecaboun. 
Pertoucat, boulguèri dintra 
Per i pourta soulàs e per lous embrassa; 
Mès un demoun, de sa fouissino, 
Faguèt tres pics à ma pouètrino 
En me cridant: — Èp! Alto-la! 
Countento-te de regarda. 
E bejèri Boutiol, sabèts? lou renegaire, 
Qu'un jour, descrestianat (8), gausèt batre sa maire; 
E Felibèrt, lou pourgo-moust, (9) 
Qu'i n' caliò tres cartous per atrouba lou goust; 
E la Catarineto, aquelo nas-lebado, 
Qu'à l'espital s'es atudado. 
Bejèri Pascal dal Pegot, (10) 
Qu'abiò souben la poulo al pot, 
Sans ana fa mercat, sans tene galinièro. 
(8) Textuellement: déchristianisé. 
(9) Textuellement: le filtre moût. 
(10) Ici, Pegot est peut-être un lieu-dit. 
Bejèri Madeloun, la bèlo jardinièro, 
Que se gèinabo pas de s'ana proubesi 
A l'orto de Pol, soun besi; 
E Janot l'insoulent, cor pus dur qu'uno bano, 
Que, quand sounabi la campano, 
Disiò per tout lou carrierat: 
— Anen, i'a 'n poucèl de penjat. 
Bejèri lou Pudis, que, quand me rencountrabo 
Anant pourta-l' boun Dius, la pipo al bèc, crachabo, 
Sans se desquita lou capèl, 
Me regardant à trabès d'èl. 
Bejèri la Suzoun, uno autro gourdimando; 
E Gaspard, e Frigoul... Fenissi pas la bando; 
Me caldriò jusquos à dema, 
E languissèts d'ana dinna. (11) 
(11) Le dîner est maintenant le repas du soir. Il n'y a pas si longtemps c'était celui de midi. Au Moyen 
Age, c'était celui du matin! 
VII 
La petarrufo abiò gagnat tout l'auditòri 
Cadun besiò à l'Enfer ou dins l'Espurgatòri, 
Ou soun paire, ou sa maire, ou soun fraire ou sa sor; 
E, per aumenta l'espoubanto, 
Un pet de troun, seguit de cranto, 
Clac-clac-clac! sang-glacèt tout cor. 
Al mitan das laussets que rumaboun las cilhos, 
Omes, goujats, fennos e filhos, 
Coumo de coups arremassats, 
Bramaboun: — Ai! moun Dius! saren toutis damnats! 
Proufitant d'aquelis desaires, 
Lou curat reprenguèt: — Besèts, mous caris fraires, 
Que tout aiço pot pas dura; 
Tabés qui escouto saurà 
Que, passat béi, fasèn ruscado; 
E de besougno auren, car la fardo es tacado. 
Aici lou plan: Dilus, coufessi lou bielhun; 
Dimars, lous drolles: tres per un; (12) 
Dimècres, goujats et goujatos: 
Sarà prou loung; dijaus, las fennos: finos gatos! 
Caldrà parti matis amai sarèi tardiè. 
Dibendres, lous masclun; dissate, l' moulmiè: 
Sarà pas trop d'un jour entiè! 
Quand l'espigo es amadurado, 
Mous efants, cal que siò segado! 
E qu'on aje set ou pas set, 
Cal escourre lou bi qu'es dins lou goubelet. 
Que Dius mande sa soulelhado, 
Per que toutis pousquets asseca la bugado; 
Respoundi dal lessiu; n'abèn 
Que s'emporto lou tros (13). Amèn. 
(12) C'est-à-dire rapidement: trois le temps d'un seul. 
(13) En français le mot lessive a aussi bien le sens de linge lavé que celui de produit de lavage. 
Le languedocien propose deux mots distincts: respectivement bugado et lessiu. 
Le produit de lessive du Curé Marty est si puissant qu'il peut enlever la tache et le tissu tout à la fois. 
VIII 
E coumo s'èro dit, cadun labèt sa fardo; 
E despèi, Nostre-Segne gardo 
De tout mal lous Cucugnanents, 
Que, l'amo en pax, biboun countents 
E milanto cops pus urouses, 
Despèi que soun benguts piouses. 
Mès qui nado dins l'òli bou? (14) 
Acò 's moussu Marti, lou brabe e boun ritou! 
L'autro nèit, l'èl doubèrt, tourna-mai soumiabo 
Que, traco-traco, caminabo, 
Laugè, la joio al frount, bès las portos dal cèl, 
Seguit en proucessiu de soun aimat troupèl, 
E qu'i mancabo pas uno fedo, un agnèl! 
(14) C'est-à-dire: qui nage dans les délices. La version occitane de cette locution montre que 
l'expression: baigner dans l'huile n'est pas aussi récente qu'on pourrait l'imaginer. |